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Une parole puissante | IIIe dimanche temps ordinaire | P. Sébastien Dehorter | 24/01/2021




Jésus passe le long de la mer de Galilée… il voit Simon et André… Il leur dit : « venez à ma suite… ». Aussitôt, laissant leurs filets ils le suivirent. C'est bref mais intense et surtout efficace !


Est-il possible qu’une simple parole puisse ainsi mettre des hommes en route et changer leur vie ? Dans la Bible, en tout cas, le phénomène n’est pas nouveau. C’est ainsi que le monde a été créé : « Que la lumière soit ! » Et la lumière fut. C’est ainsi qu’Abraham se mit en route. « Va, quitte ton pays, et ta parenté, et la maison de ton père pour le pays que je te ferai voir… » Et Abraham partit selon la parole de YHWH. C’est encore ainsi que les habitants de Ninive se sont convertis : « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! » Aussitôt, les gens de Ninive crurent en Dieu. Ils annoncèrent un jeûne, et tous, du plus grand au plus petit, se vêtirent de toile à sac. Vous connaissez le slogan de Paris-Match : « Le poids des mots. Le choc des photos ». Eh bien, dans la Bible, c’est plus fort encore car il n’y a pas d’image. Il n’y a que la Parole, la puissance de la Parole de Dieu.


Retrouver le goût de lire la Parole de Dieu

Voilà ce sur quoi nous pouvons méditer aujourd’hui, pour cultiver ou retrouver le goût de lire la Parole de Dieu, pour être davantage attentifs aux paroles que nous nous disons les uns aux autres, pour nous émerveiller enfin de ce qui se passe à chaque eucharistie.


Comment se fait-il que certaines paroles que nous entendons aient sur nous un impact si fort ? Car nous pouvons pleurer de joie ou d’émotion en lisant une simple lettre. Nous pouvons aussi humilier voire tuer quelqu’un avec une seule phrase. Nous pouvons encore, comme Jésus, mettre quelqu’un en route et changer sa vie.


La raison vient de ce que la parole n’est pas seulement une réalité extérieure, des sons qui frappent nos oreilles, mais aussi une réalité intérieure. La foi chrétienne enseigne que nous avons été créés par la Parole de Dieu – le Verbe de Dieu comme on dit – et donc que chacun de nous est une réalisation particulière et unique de cette Parole, une Parole immense qui a pris une forme abrégée en chacun. Il y a en chacun une parole qui se cache, et qui correspond pourrait-on dire à sa personnalité la plus intime, de sorte que le but de la vie est de la découvrir et de la prononcer au monde. Pour rejoindre cette intimité, nous n’avons que nos prénoms, celui que nos parents ont choisi pour nous. Mais ces prénoms sont pourrait-on dire l’emballage de cette parole intime que personne ne peut vraiment connaître sinon nous-mêmes.


Dans ce cadre, je pense que les paroles qui nous touchent sont celles qui se rapprochent de cette parole personnelle, qui viennent en percer le papier d’emballage, qui touchent à ce qui fait l’essentiel de notre raison de vivre sur terre. Comme le disaient déjà les anciens, la Bible est un miroir de l’âme. En la lisant, nous allons peu à peu nous découvrir nous-mêmes : qui sommes-nous ?, et, plus encore : à quoi sommes-nous appelés ?


Ce jour-là, au bord de la mer de Galilée, Jésus avait dit que le Royaume de Dieu s’était approché. Qui peut rester indifférent face à une parole aussi exceptionnelle ? Et peut-être que ces pêcheurs en regardant la mer devant eux ont compris que les hommes étaient un peu comme des poissons, enfermés dans leur plan d’eau, alors que le vrai monde, lui, était beaucoup plus vaste et beaucoup plus beau. Et, qu’au fond, la séparation entre ces deux mondes, le petit monde des poissons et le vaste monde de Dieu, n’était pas si difficile à franchir. À ce moment-là, qu’y avait-il dans leur cœur sinon la perception, devenue soudainement très claire, que leur grand désir à eux était de parvenir dès à présent dans le Royaume de Dieu. Telle était leur parole intime, personnelle, leur véritable prénom, leur mission sur terre. Alors vous comprenez que lorsque Jésus est passé à côté d’eux et qu’il leur a dit : suivez-moi, il n’y avait vraiment pas à hésiter. Ce n’était pas une question de destin mais de vérité. En réalité, depuis longtemps déjà, ils n’attendaient que cela. Alors, aussitôt, laissant leurs filets ils le suivirent.


Cela a plusieurs conséquences. 1) L’enjeu de l’éducation, spécialement de l’éducation spirituelle, de l’apprentissage du silence, de l’écoute, de la lecture et de l’étude de la Parole de Dieu, est de permettre à chacun de découvrir ce nom nouveau qui est sa vérité personnelle puis de l’exprimer par toute sa vie. Le slogan qui correspond à cette tâche est très simple : « découvre qui tu es et deviens enfin toi-même ». 2) Comme parents, comme éducateurs, il faut vraiment demander la grâce que nos paroles soient au service de l’épanouissement des personnes, c’est-à-dire qu’elles les aident à entrer en relation avec elles-mêmes, au plus intime de l’être, plutôt que de jouer le jeu de l’imitation des autres. Osons encourager, osons mettre debout, osons révéler la beauté des personnes qui nous entourent. 3) Pour nous chrétien, ce mystère de la parole vivante et efficace a pris un visage en la personne de Jésus-Christ. Jésus est un livre ouvert. Le regarder c’est écouter et apprendre à nous déchiffrer nous-mêmes, à comprendre notre propre histoire, à découvrir la mission qui nous appelle. Au cours de chaque eucharistie, une parole d’une étonnante puissance est prononcée à l’extérieur de nous mais aussi en nous : « ceci est mon corps livré pour vous ». Cette Parole, c’est la vérité intime de Jésus, son nom à lui ; c’est elle qu’il prononce pour nous, c’est elle qui nous le livre. Communier à Jésus c’est aussi le laisser ouvrir notre papier d’emballage jusqu’au jour où, enfin libres, nous le suivrons d’un pas léger.



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