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Homélie pour le 25E dimanche du Temps ordinaire | 18/09/2022 | P.Damien Desquesnes.


Certains propos du Seigneur sont quelquefois difficiles à comprendre. C’est le cas de la parabole d’aujourd’hui, celle du gérant malhonnête. Cet homme a été renvoyé de sa gérance parce qu’il avait volé son maître. Et il vole encore une dernière fois en allégeant les dettes de ses ouvriers, pour que ceux-ci lui fassent bon accueil. Il y a en effet des hommes habiles à chaque époque. C’était le cas au temps de Jésus comme au temps du prophète Amos, huit siècles avant notre ère. Et c’est encore le cas aujourd’hui… Il est parfois sidérant de voir que, même en pleine crise économique, certains savent tirer leur épingle du jeu, et souvent au détriment des autres. Curieusement, la déception de Jesus n’est pas là…


Elle n’est pas dans le fait que certains abusent des autres. Où est-elle cette déception ? Elle est dans le fait que les fils des ténèbres sont plus habiles dans leurs affaires que les fils de la lumière, sous-entendu dans leurs propres affaires, c’est-à-dire dans les énergies qu’ils doivent déployer pour habiter dans les demeures du ciel. Sur ce point, ils se montrent moins astucieux. Être habile dans les affaires de ce monde, se débrouiller avec les biens matériels, le bon sens nous l’apprend ; l’école de la vie nous forme à cela ; une sorte d’égoïsme inné nous y pousse. Mais c’est autre chose quand il s’agit d’être accueillis dans les demeures éternelles. « Vous pouvez bien vous faire des amis avec l’argent trompeur », cela ne vous aidera pas à y entrer ! Nous sentons bien toute l’ironie de Jésus. Saint François, le patron de notre paroisse, avait quant à lui une attitude radicale par rapport à l’argent : il ne voulait plus en avoir du tout. Il avait embrassé Dame pauvreté.


Il vivait pauvrement, d’une pauvreté voulue. Mais faut-il, dans le concret d’une existence humaine, adopter une attitude binaire ? Le tout ou rien… La façon de vivre de saint François était prophétique et compréhensible dans le contexte de son époque. Mais cela ne fut pas sans poser de problème par la suite. L’histoire a montré que le caractère prioritaire et absolu de la pauvreté a été problématique dans l’ordre fondée par saint François. Comment en effet envoyer des frères étudier sans qu’ils possèdent de livres ? En méditant sur la vie de saint François, le père Romano Guardini disait que si un homme riche était allé voir saint François, il ne serait pas rentré chez lui dépouillé de ses biens, mais avec une autre échelle de valeur par rapport à l’argent. Précisément, Jésus veut nous conduire à cet équilibre. Il nous invite à placer notre vie sur le plateau d’une balance et à mettre sur l’autre l’éternité. Les deux plateaux sont en équilibre quand nous comprenons que tout dans notre vie, y compris la gestion de l’argent, est une préparation à l’éternité. C’est ainsi que nous nous pénétrons de mesure et des valeurs morales de justice et d’équité.


C’est également de cette façon que ces valeurs peuvent s’enraciner profondément en nous, influencer durablement notre comportement et enfin nous rendre moins sensibles par rapport à tout espèce de séduction. Elles nous apprennent à gérer l’argent sans le convoiter. Frères et sœurs, c’est la perspective de l’éternité qui nous permet en fin de compte de mettre les choses matérielles à leur juste place. Mais, ce faisant, n’avons-nous pas retrouvé tout simplement ce que nous enseigne la sagesse humaine : l’argent est un moyen et non pas un but. Le bon sens montre aussi que l’argent ne nous accompagne pas dans la mort. Si je vous parle de ce que tout le monde peut savoir par soi-même, que sommes-nous venus apprendre ici à l’église ? Rassurez-vous, vous n’avez pas perdu votre temps, et cela pour deux raisons. Tout d’abord, ici, mais pas toujours ailleurs, le caractère relatif de l’argent est affirmé de façon solennelle.


Le passage d’aujourd’hui ne nous permet pas d’ignorer cela. Ainsi, le Seigneur nous fait-il une bonne piqûre de rappel. L’Évangile nous adresse donc un avertissement moral puissant qu’il est toujours bon d’apprendre d’un autre. En effet, les meilleures limites sont celles qu’on nous impose. Je ne dis pas que ce sont les plus agréables, mais nous les franchissons moins allègrement. Par contre, les limites que nous nous fixons à nous-mêmes, nous trouvons facilement un prétexte pour les transgresser sans que cela taraude notre conscience. Ensuite, l’avertissement n’est pas que moral…


À propos de l’argent, l’Écriture nous révèle ceci : « l’amour de l’argent est à la racine de tous les maux (1 Tim 6,10) » ; « la cupidité est une idolâtrie (Col 3,5) » ; et le Seigneur dit que nous ne pouvons pas servir à la fois Dieu et l’argent. Ailleurs Jésus désigne l’argent par ce terme : « Mammon » (Mt 6,24), c’est-à-dire comme une puissance malfaisante. La question de l’argent est ainsi une question spirituelle et religieuse. L’amour de l’argent combat Dieu et son salut. Il rend esclave celui qui le convoite, qu’il soit riche ou pauvre. Quant à moi, je prie pour que chacun ait ce qu’il faut et pour qu’il vive, par rapport à l’argent, un détachement intérieur. Possédons des biens utiles, mais comme si on ne les possédait pas vraiment parce que le temps se fait court (1 Co 7,29).

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