Aujourd’hui, nous faisons mémoire du don de l’Esprit sur les apôtres autant que sur l’Église dans son ensemble.
Jésus en avait fait la promesse : « Demeurez à Jérusalem jusqu’à ce que vous soyez revêtus de la force d’en haut » (Lc 24,49). Le Seigneur semble donc identifier l’Esprit avec sa caractéristique la plus évidente : la force, la puissance. Et la première manifestation de cette force, c’est de faire sortir les apôtres du lieu où ils s’étaient enfermés par peur des Juifs (Jn 20,19). Elle les fait sortir pour qu’ils annoncent un Évangile qui est « une force de Dieu pour le salut de tout croyant » (Rm 1,16).
Oui ! L’Esprit fait éclore l’Église en ce monde en la projetant constamment au-delà de ses frontières : les portes du cénacle tout d’abord, puis les murs de Jérusalem pour atteindre enfin les nations païennes.
L’Esprit est toujours une force active qui imprègne l’Église. Il lui interdit de penser ou de croire qu’elle est là pour elle-même… C’est l’Esprit qui fait d’elle le signe et le moyen de notre union avec Dieu et de l’unité de tout le genre (Lumen Gentium n°1). Ainsi, par la présence de l’Esprit, l’Église constitue une réalité surnaturelle à l’intérieur de ce monde ; elle est revêtu de la force d’en haut pour le salut de tous les hommes.
Le récit de la Pentecôte que nous trouvons dans les Actes des Apôtres montre que l’Esprit est répandu sur l’Église dans son ensemble et sur chacun de ses membres en particulier.
Alors en quoi manifeste-t-il sa force dans nos vies ? Quelle est la limite où la frontière qu’il nous permet de franchir ?
Saint Paul pointe une limite morale qui nous est commune à tous : c’est l’ornière de la convoitise de la chair. Celle-ci caractérise tôt ou tard notre action quand nous ne tenons compte que de nous-mêmes ou de nos propres intérêts. Cette convoitise s’est exprimée quand Ève se mit à contempler l’arbre de la connaissance du bien et du mal (Gn 3,6) et qu’en le contemplant, se développa en elle le désir de prendre le fruit de l’arbre de la connaissance pour le manger.
Étrangement, on voit la même chose se reproduire auprès du petit enfant qui prend aussi les objets autour de lui pour les porter à sa bouche. Peut-être est-ce là le signe de cette convoitise, dont, selon saint Paul, aucun homme ne peut concrètement échapper à son emprise sur son comportement. Mais l’Esprit montre toute sa force quand il imprime à nos âmes un mouvement opposé à la convoitise : le don de soi !
C’est ainsi qu’il agit pendant le ministère de Jésus : l’Esprit le pousse à mener une vie toujours plus offerte. Et cela jusqu’au don de sa propre vie : un don qui rendra également sa vie féconde (He 9,14). Retenons donc ce conseil de l’apôtre : « Marchez sous la conduite de l’Esprit et vous ne risquerez pas de satisfaire la convoitise de la chair » (Ga 5,16).
Frères et sœurs, l’Esprit répandu sur l’Église est le même qui est répandu au fond de nos âmes. Ce qu’il fait au plus profond de nous — tous ces petits dons de soi, toutes ces victoires sur la convoitise — tout cela fait la beauté de l’Église et rend son témoignage lumineux au milieu des hommes !
Sans doute est-ce sur ce point que repose la fécondité missionnaire de l’Église : les victoires de l’Esprit sur les freins que la chair oppose au don de soi… Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus l’avait bien compris ; et l’Église aussi en faisant d’elle la patronne secondaire des missions. Sa vie comme religieuse n’a été remplie que de petits actes d’amour de rien du tout : des petits petits actes héroïques qui étaient autant de victoires de l’Esprit sur la chair. Et cependant, quelle fécondité ! Encore aujourd’hui, la « petite Thérèse » ne cesse de gagner les cœurs les plus endurcis.
Frères et sœurs, la mission et le renouveau de l’Église ne sont pas affaire de plan, mais ils sont toujours l’œuvre de personnes concrètes et en premier lieu des saints. Or et précisément, c’est ce que l’Esprit veut faire de nous : des hommes et des des femmes qu’il sanctifie.
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