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Homélie pour la fête de l'Assomption I p. Damien I 15/08/2021



J’avais fait à Rome la connaissance d’un prêtre camerounais dont la passion était la chasse au boa. Cela n’est réservé qu’aux bons chasseurs. Il faut en effet atteindre l’animal à la tête directement. Toucher une autre partie, c’est voir la bête s’enfuir. Mais si pour mieux viser la tête, on est trop près, on risque d’être fauché par les convulsions de l’animal…


Pourquoi parler de cela ? Parce que ce boa est l’image du vieil homme qui est en nous et dont le Christ la écrasé la tête quand nous avons été plongés dans les eaux baptismales. Il est mort, mais il bouge encore ; et paradoxalement ses mouvements n’ont probablement jamais été aussi vifs que depuis qu’il est mort. Impressionnant, n’est-ce pas ? Mais ceux qui, dans l’impulsion de la grâce du baptême, veulent se mettre à l’école du Christ et sont devant les convulsions du vieil homme – les mouvements égoïstes de la chair, comme le dit saint Paul – constatent combien celles-ci sont violentes, tyranniques, difficiles à maîtriser, irrationnelles. Et on ne sait pas quand elles se termineront.


Devant un tel constat, qui n’a jamais perdu cœur, été près de cesser la lutte ou douté de la présence et de la force de la grâce ?




Frères, quand nous sommes dépassés par les circonstances, ayons ce réflexe de prendre de la hauteur. Or, nos hauteurs, ce sont les Écritures. Où y rencontre-t-on le serpent ? Que dit Dieu à son sujet ?


Le serpent apparaît pour la première fois dans le jardin de la Genèse. C’est là que Dieu a placé nos premiers parents, au milieu d’une nature luxuriante. Le serpent aussi s’y est glissé, parlant à la femme de façon mensongère, la tentant et la faisant tomber elle et son mari. Dieu maudit le serpent. Il s’adressa à lui : « Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ton lignage et le sien. Il t’atteindra à la tête et tu l’atteindra au talon. » (Gn 3,15) La descendance de la femme, c’est le Christ ; c’est lui qui écrasera le serpent.


On voit encore apparaître le serpent à la fin de l’Écriture, dans le livre de l’Apocalypse, et plus spécialement dans le passage que nous avons entendu en première lecture. La scène nous montre l’ampleur de cette hostilité. Par rapport à la Genèse, tout a enflé. On y retrouve la Femme – Marie, l’Ève nouvelle – l’enfant mâle – le Christ – et le Dragon que l’Apocalypse désigne comme l’antique serpent. Avec eux, il y a encore toutes les puissances du monde invisible. Le combat est acharné ; la guerre est totale. On en trouve un écho dans le combat spirituel que chacun mène pour sa part quand nous devons choisir entre le bien et le mal.

De tout cela, retenons que Marie est dans ce combat ; elle y est tout entière engagée. Elle est l’objet de la haine du Dragon, mais elle n’a pas peur : elle est vierge, mais pas effarouchée ; c’est une femme, mais quelle force, quelle virilité !


Il n’est donc pas étonnant que la Tradition de l’Église applique à son sujet ce verset qui concerne l’épouse du Cantique des cantiques : « Qui est celle-ci qui monte comme l’aurore, belle comme la lune, resplendissante comme le soleil, redoutable comme des bataillons. » (Ctq 6,10) Comme il est étrange de voir la mère de Jésus comparée à une armée ! Mais comme cela est juste !


Il y a encore ces paroles dites par les prêtres de Jérusalem à Judith. Elle revient de son coup d’audace : elle s’est introduite dans le camp des Assyriens et y a tué Holopherne. « Tu es la gloire de Jérusalem ! Tu es la fierté de notre peuple ! Bénie sois-tu par le Seigneur tout-puissant dans la suite des temps ! » (Jdt 15,9..10)


Je vous ai parlé du combat de Marie. Aujourd’hui cependant, nous célébrons sa victoire. Élevée au ciel avec son âme et son corps, le Dragon ne peut plus l’atteindre. Mais du ciel, elle voit aussi la multitude des cœurs des disciples. Que d’âmes chrétiennes peuvent témoigner que tout a changé dans leur vie quand ils ont fait l’expérience de l’intervention de Marie. La conscience du peuple de Dieu le sait : une conscience nourrie d’une histoire deux fois millénaire.


Frère, n’hésite pas à prendre la Vierge élevée au ciel comme ton meilleur allié. Et avec elle, prends ta part du combat, celui que t’offrent les circonstances de la vie – il ne faut pas aller loin dans la forêt pour trouver un boa. Marie est forte ; elle veut que tu sois fort. Tu ne le seras qu’en étant aux prises avec les gesticulations du vieil homme. Il est mort et il bouge encore, mais bientôt il va arrêter de remuer. Déjà un homme nouveau est né ; il vivra pour l’éternité.


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