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Homélie du 1E dimanche de carême - Année A | 26/02/2023 | P.Damien Desquesnes.


Chaque année, nous entendons, lors du premier dimanche de carême, le récit des tentations de Jésus au désert. Mais, cette année, la liturgie nous donne l’occasion de mettre cet épisode en parallèle avec le récit de la chute d’Adam et Ève ; nous l’avons entendu en première lecture. Mettons-nous dans la peau de ces personnages : de Jésus, d’une part, et du premier couple humain, d’autre part. Faisons cela pour mieux comprendre quel est l’enjeu du carême et la tâche que celui-ci nous appelle à accomplir.


Nous voyons tout d’abord Jésus tenté, mis à l’épreuve par le diable. Celui-ci lui rappelle qui il est : le Fils de Dieu. Il lui suggère de s’appuyer sur cette dignité pour revendiquer des droits démesurés. Il le fait habilement : en tordant la vérité de la parole de Dieu et en attendant un moment de faiblesse. Mais Jésus résiste ! Les trois assauts que le diable entreprend se soldent par un échec. Jésus lui répond avec droiture ; il ne lui laisse pas la possibilité de surenchérir.


Frères et sœurs, avant de vous parler de premier couple humain, il importe de réaliser ce que la tentation représente pour Jésus… Il est éternellement de Fils ; depuis toujours, il est dans le sein du Père. Nous le croyons et le diable de sait encore mieux que nous ! Cela veut dire que de toute éternité, Jésus n’a jamais eu le moindre soupçon au sujet de l’amour que le Père lui porte. La tentation fut donc pour lui une expérience inédite. Pour la première fois, Jésus rencontre quelqu’un qui a voulu le tromper. Et c’est en venant vivre parmi nous qu’il a connu pareille épreuve… Mais si Jésus a tenu bon, c’est parce qu’il a réalisé que la difficulté d’un moment ne pouvait pas faire mentir le témoignage de l’éternité.


Considérons maintenant le premier couple humain. Le voilà soumis lui aussi à une épreuve, mais dont il semble à peine conscient. Sous la figure d’un serpent qui se tortille, le diable s’approche pour lui mentir. L’homme et le femme sont à peine venus au monde ; ils sont tous les deux innocents. Le mal et la tromperie, ils ne l’ont jamais rencontrés ; ils ne savent ce qu’est la malice ; ils ne peuvent concevoir que quelqu’un leur veuille du mal. Et c’est pour cela qu’ils tombent dans la piège du serpent…


Nous avons donc deux personnages : Jésus et le premier couple humain. Nous avons deux innocences et deux épreuves assez similaires, mais deux issues différentes. Pour Jésus, c’est la victoire remportée dans l’âpreté du désert ; pour nos premiers parents, c’est une défaite dans la luxuriance d’un jardin.


Mais pourquoi deux issues complètement opposées ? C’est que l’homme et la femme de la Genèse sont certes innocents, mais ils sont aussi bien naïfs. Leur langage n’a pas d’épaisseur; il ne sert alors qu’à désigner les animaux. Le jardin dans lequel ils se promènent, ils n’en connaissent pas la valeur ; c’est pourquoi ils le perdent sottement. Pour Jésus c’est tout autre chose ! L’amour que le Père lui porte a du prix. Il ne peut douter que celui-ci est inestimable. Il ne renoncera pas à cet amour en abusant de son pouvoir pour sa facilité.


Je voudrais terminer cette méditation en en venant à la question du début : quel est l’enjeu de ce carême ? Et quelle tâche nous faut-il accomplir ? Notre tâche n’est en fait pas très compliquée à concevoir… Il s’agit de partir de là où nous sommes, c’est-à-dire du point où le premier couple humain est tombé. Comme eux, nous ne sommes pas innocents. Notre travail, c’est simplement de tout faire pour recouvrer cette innocence. Il s’agit de « récupérer » cette qualité que l’humanité possédait à l’origine, mais sans redevenir naïfs. Il s’agit, comme le dit Jésus, d’être candides comme des colombes, mais rusés comme des serpents.


Frères et sœurs, Dieu veille à cela pendant ce carême. Il a voulu que le chemin du retour à l’innocence soit un chemin qui ne va pas de soi : c’est la route de l’effort et de la pénitence. C’est la condition pour que nous estimions le prix de l’innocence, pour que nous nous y attachions, pour que nous ne la perdions pas pour l’étourderie d’un moment, pour que l’innocence soit guérie de la naïveté.


Je ne veux pas vous faire peur en vous parlant d’un « chemin de pénitence ». Rappelonsnous simplement que Jésus l’a emprunté alors qu’il n’était pas nécessaire pour lui d’y marcher. Il y a en effet progressé pour nous, afin que nous l’empruntions sans crainte, pour qu’en le parcourant avec lui, dans son esprit et dans sa force, notre marche produise un fruit de justice.





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